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Claude Nougaro - VICTOR Lyrics



Claude Nougaro - VICTOR Lyrics




Après râles et cris et terribles efforts
Des cuisses écartées émergea une tête.
Énorme cette tête, bientôt suivie du corps...
Bien malingre ce corps, bien proche du squelette
Le père aimait Hugo. Il prénomma Victor
Ce fils dont le destin défraya les gazettes:
Celui de l'homme à la cervelle d'or.

L'enfance s'écoula au royaume des bosses.
Victor se cognait partout.
Sur le torse chétif, cette tête trop grosse
Basculait tout à coup,
Le marbre du perron, le pied de la console
Frappaient sur ce front balourd
Et les mains de maman sur ses genoux consolent
Le sanglotant tambour.
Voici l'été. Quinze ans. L'adolescence fière
Les rochers ocres, la mer...
Dans l'air étincelant, le garçon, par les pierres,
Bondit vers cette chair,
Cette chair qui chatoie, qui respire et murmure
Les versets de l'univers,
Mais voici le plongeon, voici la pierre dure,
Voici le crâne ouvert.

Le garçon vit encore. Lentement son bras bouge
Il atteint de ses doigts le sommet de son front
Il saisit quelque chose entre les cheveux rouges,
Comme un bout de métal, comme un grumeau de plomb
Mais ce n'est pas du plomb, le caillot étincelle
Et Victor le contemple, hagard, de ses yeux morts
Et soudain il comprend le poids de sa cervelle...
Sa cervelle ébréchée est faite d'un bloc d'or.

Dans le jour finissant, il rentrera chez lui.
À tous il cachera le caillot qui reluit.

Vingt ans. Il a vingt ans. Victor fait de l'escrime;
Ça fortifie ses jarrets.
Son fardeau cervical presque plus ne l'opprime.
Il le garde secret.
Son père disparu lui laissa sa fortune...
À nous les nuits de Paris!
Mais de femme auprès de lui, pas l'ombre d'une
Leur regard le meurtrit.
Victor n'aime que l'art, fréquente les poètes,
Pratique le mécénat.
Un soir dans un salon, un visage le fouette
Le visage d'Anna.
"C'est un diable masqué beaucoup plus qu'une femme
Lui ricane un écrivain
Si vous voulez chuter du plus haut de votre âme,
Anna est un ravin. "

L'invasion du désir vous transforme en désert.
Tout est vide excepté ce soleil qui vous brûle.
Blindez vous de refus, tel un rayon laser
La pulsion suraigüe vous crève comme bulle.
Victor s'est enfermé et devant un miroir,
Les yeux troués de fièvre, il penche de la tête;
Puis la redresse haut dans une aile d'espoir...
Il est riche! Avec l'or se forgent les conquêtes.

Une semaine après, la nuit inoubliable
Victor se sent un Dieu et couche avec le diable.

Après râles et cris, vertigineux transports,
Des cuisses écartées d'Anna, Victor s'arrache...
Il lui lèche le nez; ses orteils, il les mord,
De ses fauves cheveux se fait une moustache.
À bord d'un blanc voilier, de vieux port en vieux port,
Leur jeunesse dorée crépite sans relâche
Là bas, veille le coffre fort.

"Mon signe est le poisson, j'ai besoin de rivières,
Tu sais, celles en diamants"
Roucoule un jour Anna, enroulée comme lierre
Au tronc de son amant.
Le soir même apparaît dans l'écrin de soie verte
Un reptile irradieur.
Pour le lait de la peau les perles sont offertes,
Le rubis pour le cœur.

"Sois sage, ô ma douleur, et tiens toi plus tranquille"
Victor lit les "Fleurs du Mal".
"Une calme langueur enveloppe la ville...
Si nous allions au bal?
Ma puce tu m'ennuies avec ton Baudelaire.
Demain, demain tu liras."
Et chante le champagne! Et vogue la galère
Vers d'ardents baccaras!

Dix huit cent cinquante huit. Trottinant sous la bruine,
Un fiacre s'en revient. À l'intérieur, Victor.
Le notaire à lorgnon prononça le mot "ruine".
Un terme bien chinois pour un psychisme d'or.
"Eh bien, bonsoir Paris! La demeure en Gironde
Durant quelques saisons tous deux nous recevra.
D'ailleurs, il était temps de fuir un peu le monde.
Je pourrai composer mon livret d'opéra."

L'amoureuse se farde. On lui dit que l'or passe.
Le visage flambant se glace dans la glace.

Est ce bien de l'amour, l'amour du haïssable?
Vous ne valez plus rien, les mains vides d'écus.
L'écumante Vénus vous laisse sur le sable
Et s'en va, Dieu sait où, troquer son joli cul.
Est ce bien de l'amour, ce poison qui vous manque?
Ce cauchemar tordu dans la noirceur des draps?
Tournoie l'ange maudit. Son temple est une banque.
Vers l'horrible Jésus, Victor tend ses deux bras.

L'obsession se glissa par d'affreuses persiennes:
Le trésor enfoui dans la boîte crânienne.

Victor lâche, hoquetant, la bouteille de fine,
Tout flotte dans du violet.
Paupières, crispez vous et pincez vous, narines
Il saisit le piolet.
Il serre fortement l'instrument alpiniste,
L'orientant vers l'occiput,
Et l'abat comme un bœuf. Éclate la pépite
Qui asservit les putes.

Richesse, ton parfum, très vite ça se hume
De nouveau, chez Victor, les lustres se rallument.

Parée de repentirs revient la courtisane...
Nouvelle lune... de fiel.
Lorsque la fille boude, on se creuse le crâne
Sort le minéral miel.
La folie du marteau trépane un dernier lobe,
Racle les derniers éclats.
Anna est repartie avec sa garde robe...
Pour Victor, elle est là,
Elle est là
Elle est là
"Anna, Anna, Anna ma chère
Anna sois bonne pour un soir...
Ma tête est vide... mais tu vas voir
Dans un tiroir du secrétaire
J'ai l'or le plus pur de la terre...
Mon trésor secret... ma misère
J'avais quinze ans... la mer... la pierre...
Viens, c'est à toi, je te le donne
Anna, Anna..."

Le cadavre béant gît au pied du fantôme
Le caillot de jadis rayonne dans la paume
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Après râles et cris et terribles efforts
Des cuisses écartées émergea une tête.
Énorme cette tête, bientôt suivie du corps...
Bien malingre ce corps, bien proche du squelette
Le père aimait Hugo. Il prénomma Victor
Ce fils dont le destin défraya les gazettes:
Celui de l'homme à la cervelle d'or.

L'enfance s'écoula au royaume des bosses.
Victor se cognait partout.
Sur le torse chétif, cette tête trop grosse
Basculait tout à coup,
Le marbre du perron, le pied de la console
Frappaient sur ce front balourd
Et les mains de maman sur ses genoux consolent
Le sanglotant tambour.
Voici l'été. Quinze ans. L'adolescence fière
Les rochers ocres, la mer...
Dans l'air étincelant, le garçon, par les pierres,
Bondit vers cette chair,
Cette chair qui chatoie, qui respire et murmure
Les versets de l'univers,
Mais voici le plongeon, voici la pierre dure,
Voici le crâne ouvert.

Le garçon vit encore. Lentement son bras bouge
Il atteint de ses doigts le sommet de son front
Il saisit quelque chose entre les cheveux rouges,
Comme un bout de métal, comme un grumeau de plomb
Mais ce n'est pas du plomb, le caillot étincelle
Et Victor le contemple, hagard, de ses yeux morts
Et soudain il comprend le poids de sa cervelle...
Sa cervelle ébréchée est faite d'un bloc d'or.

Dans le jour finissant, il rentrera chez lui.
À tous il cachera le caillot qui reluit.

Vingt ans. Il a vingt ans. Victor fait de l'escrime;
Ça fortifie ses jarrets.
Son fardeau cervical presque plus ne l'opprime.
Il le garde secret.
Son père disparu lui laissa sa fortune...
À nous les nuits de Paris!
Mais de femme auprès de lui, pas l'ombre d'une
Leur regard le meurtrit.
Victor n'aime que l'art, fréquente les poètes,
Pratique le mécénat.
Un soir dans un salon, un visage le fouette
Le visage d'Anna.
"C'est un diable masqué beaucoup plus qu'une femme
Lui ricane un écrivain
Si vous voulez chuter du plus haut de votre âme,
Anna est un ravin. "

L'invasion du désir vous transforme en désert.
Tout est vide excepté ce soleil qui vous brûle.
Blindez vous de refus, tel un rayon laser
La pulsion suraigüe vous crève comme bulle.
Victor s'est enfermé et devant un miroir,
Les yeux troués de fièvre, il penche de la tête;
Puis la redresse haut dans une aile d'espoir...
Il est riche! Avec l'or se forgent les conquêtes.

Une semaine après, la nuit inoubliable
Victor se sent un Dieu et couche avec le diable.

Après râles et cris, vertigineux transports,
Des cuisses écartées d'Anna, Victor s'arrache...
Il lui lèche le nez; ses orteils, il les mord,
De ses fauves cheveux se fait une moustache.
À bord d'un blanc voilier, de vieux port en vieux port,
Leur jeunesse dorée crépite sans relâche
Là bas, veille le coffre fort.

"Mon signe est le poisson, j'ai besoin de rivières,
Tu sais, celles en diamants"
Roucoule un jour Anna, enroulée comme lierre
Au tronc de son amant.
Le soir même apparaît dans l'écrin de soie verte
Un reptile irradieur.
Pour le lait de la peau les perles sont offertes,
Le rubis pour le cœur.

"Sois sage, ô ma douleur, et tiens toi plus tranquille"
Victor lit les "Fleurs du Mal".
"Une calme langueur enveloppe la ville...
Si nous allions au bal?
Ma puce tu m'ennuies avec ton Baudelaire.
Demain, demain tu liras."
Et chante le champagne! Et vogue la galère
Vers d'ardents baccaras!

Dix huit cent cinquante huit. Trottinant sous la bruine,
Un fiacre s'en revient. À l'intérieur, Victor.
Le notaire à lorgnon prononça le mot "ruine".
Un terme bien chinois pour un psychisme d'or.
"Eh bien, bonsoir Paris! La demeure en Gironde
Durant quelques saisons tous deux nous recevra.
D'ailleurs, il était temps de fuir un peu le monde.
Je pourrai composer mon livret d'opéra."

L'amoureuse se farde. On lui dit que l'or passe.
Le visage flambant se glace dans la glace.

Est ce bien de l'amour, l'amour du haïssable?
Vous ne valez plus rien, les mains vides d'écus.
L'écumante Vénus vous laisse sur le sable
Et s'en va, Dieu sait où, troquer son joli cul.
Est ce bien de l'amour, ce poison qui vous manque?
Ce cauchemar tordu dans la noirceur des draps?
Tournoie l'ange maudit. Son temple est une banque.
Vers l'horrible Jésus, Victor tend ses deux bras.

L'obsession se glissa par d'affreuses persiennes:
Le trésor enfoui dans la boîte crânienne.

Victor lâche, hoquetant, la bouteille de fine,
Tout flotte dans du violet.
Paupières, crispez vous et pincez vous, narines
Il saisit le piolet.
Il serre fortement l'instrument alpiniste,
L'orientant vers l'occiput,
Et l'abat comme un bœuf. Éclate la pépite
Qui asservit les putes.

Richesse, ton parfum, très vite ça se hume
De nouveau, chez Victor, les lustres se rallument.

Parée de repentirs revient la courtisane...
Nouvelle lune... de fiel.
Lorsque la fille boude, on se creuse le crâne
Sort le minéral miel.
La folie du marteau trépane un dernier lobe,
Racle les derniers éclats.
Anna est repartie avec sa garde robe...
Pour Victor, elle est là,
Elle est là
Elle est là
"Anna, Anna, Anna ma chère
Anna sois bonne pour un soir...
Ma tête est vide... mais tu vas voir
Dans un tiroir du secrétaire
J'ai l'or le plus pur de la terre...
Mon trésor secret... ma misère
J'avais quinze ans... la mer... la pierre...
Viens, c'est à toi, je te le donne
Anna, Anna..."

Le cadavre béant gît au pied du fantôme
Le caillot de jadis rayonne dans la paume
[ Correct these Lyrics ]
Writer: Maurice VANDER, Claude NOUGARO
Copyright: Lyrics © MUSIC SALES CORPORATION, LES EDITIONS DU CHIFFRE NEUF




Claude Nougaro - VICTOR Video
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