La gueule de bois, j'viens d'm'lever, c'est l'début d'une autre journée, le soleil qui pète dans ma chambre, le facteur qui monte l'escalier. Comme d'habitude y aura pas l'temps, d'mettre l'enveloppe dans 'slot d'la porte, que je l'ai déjà décachetée pour voir c'que j'pourrai pas m'acheter. J'me pitche à caisse populaire... Merde c'est l'premier, ça va être l'enfer...
Le vent m'amène toutes sortes d'odeurs, de crotte de chien, de pipi d'chat, de parfum cheap, de mets chinois, de bocks de bière, pis d'cendriers qui ressuscitent la puanteur vomie des ventilateurs, c'est là que m'est revenue l'envie, d'aller m'asseoir où j'passe ma vie, à la taverne chez Roger, là où ma place est réservée! Waiter!!! Une heure plus tard , idée d'génie, je préfère boire en compagnie. Un vingt-cinq cennes dans l'téléphone... Salut bonhomme ! Comment ça va ? Viens donc me rejoindre, tu l'croiras pas, aujourd'hui c'est sur mon bras... Waiter!!!
Le v'là tu pas, bâtard! J'vois double, Frisé s'ramène avec le grand, j'en espérais jamais autant, j'l'avais pas vu depuis dix ans... Frisé qui bosse toute la journée...Le grand, sa blonde l'à encore lâché... Pis Bourassa qu'y a crever là... Y a pas de remède contre le sida... On peut reprendre où on s'est laissé... Refaire encore la société... Waiter!!! Ça viendra-tu d'en haut...? Ça viendra-tu d'en bas...? Par la violence, ou l'innocence, une fois pour toutes clore le débat... On fait des flos et on pose des bombes, avant de se retrouver dans' tombe...
Frisé lui, y' aimerais partir sur la grande route vers le délire... Les beaux voyages imaginaires... L'atlas mondial, ça coûte moins cher...Dean Moriarty c'était son idole, Frisé s'contente de sa grosse Mol. Le grand lui devient exigeant dès qu'on lui parle de sentiments... Y quête encore l'amour parfait, mais le romantisme n'a plus d'attrait... Y'aimerait ben trouver sa Juliette pour remplacer sa bière tablette. Tant qu'a moi j's'rais ben mercenaire, mais je ne suis qu'un bénéficiaire. Tout les mois on m'envoie un chèque, c'est pour ça que j'me cloue le bec... Les seules batailles que j'ai gagnées... C't'à la taverne de mon quartier ... Waiter!!! Minable comme ça, c'est ben gênant... C'est le destin apparemment... On pourrait ben croire à plein d'poutines...Mais le vent tourne et on s'incline... Notre table est un cimetière de beaux projets de visionnaires qui se sont noyés dans la bière, c'est le système qui récupère... Waiter!!!