Dans une église close par un soir maladif
S'essayait à voler un jeune homme chétif
Le voleur concentré s'avance à pas feutrés
Ses bras sont si frêles et son teint est si blême
On dirait qu'il a fait des millions de carêmes
Et tandis qu'il s'approche de Jésus et sa gloire
Son visage de lune est empreint de terreur
Un à un, les tiroirs sont ouverts, et forcées, les armoires
Hélas! Chandeliers d'or et ciboires
Ont depuis bien longtemps disparu vers les coffres des banques
Qui offrent des taux d'intérêt
Le voleur bredouille s'apprête à repartir
Quand soudain sous la lune en vitraux
Apparaissent deux vases magnifiques
Sont-ils en marbre, en faïence précieuse?
Des Vierges de jade minuscules et parfaites
Sont sculptées en relief dans des alcôves bleues
Le jeune homme s'enfuit, son trésor dans un sac
Mais arrivant chez celui qui lui donne refuge
Depuis une semaine, et qu'une hépatite gruge
Il est reçu par des cris d'épouvante
"Ça porte malheur, il faut que tu les rendes!"
Tremble le malade, de son lit sépulcral
Le voleur en courant, les deux vases, ramène
Les dépose à la porte de l'église et amen
Une semaine après, par une nuit, épuisé
Il rencontre une Anglaise jeune et belle et frisée
En cherchant où dormir, en marchant dans les rues
Ils arrivent à l'église par hasard
Ils s'assoient dans les marches
De baiser en baiser, ils en arrivent au fait
Elle relève sa jupe et ôte son t-shirt
Il se couche sur le sol
Elle s'assoit sur lui
Derrière elle, le clocher se découpe dans le ciel
Ses cheveux défaits, je vous dis, elle est belle
Il la contemple, incrédule, et soudain, il la reconnaît
C'est la Vierge du vase entourée des nuages
De vitraux colorés et d'angelots d'or
Dont le parfait visage luit, comme baigné de larmes
Pauvre jeune homme affamé et coupable
Dieu n'a que faire de tout l'or des autels
Tes deux vases inutiles, il te fallait les vendre
Lui payer le resto, et cinq jours à l'hôtel