Il y a des poètes
Qui torturent les mots
Qui menacent les lettres
Du bout de leur mégot
Des griffonneux, des cancres
Des fraudeurs de la prose
Qui bave de toute leur encre
Pour ne pas dire grand-chose
Et il y a vous
Oui il n'y a que vous
Ignorant ceux qui trichent
Ecrivant avec goût
Rimant on n'peut plus riche
Faisant autant d'jaloux
Que d'gens qui vous récitent
Qui quand ils vous imitent
N'vous arrivent pas aux genoux
Oui il n'y a que vous
Maîtrisant le crayon
Et devenant du coup
Plus grand que l'émotion
Plus grand que les pays
Qui plantent vos refrains
Au creux de leurs jardins
Qui embaument l'esprit
Il y a des chanteurs
Qui souillent des coins de scène
Quand les semelles qu'ils traînent
Lancinent en mineur
Ils cachent leurs yeux vides
Se tordent et puis se plaignent
D'une sourde voix qui saigne
De longs couplets liquides
Et il y a vous
Oui il n'y a que vous
La voix comme un récif
L'esprit au garde-à-vous
Le sourcil expressif
Vous tendez vos yeux pleins
Aux foules qui se pâment
Et vous avez soudain
La taille de votre âme
Vous êtes plus grand que vous
Vous trônez comme un roi
Les mots sont des bijoux
Qui vous tombent des doigts
Et on les porte en nous
Ce qui fait que voilà
Quand vous rentrez chez vous
Vous ne nous quittez pas
Puis il y a des hommes
Des hommes par millions
Qui tristement plafonnent
Dans leur évolution
Et il y a vous
Vous si intemporel
Si grand mais si fragile
Penché comme un bon ciel
Au-dessus de votre famille
Il y a surtout vous
Ruisselant sous vos cils
Quand vous frôlez la joue
De votre petite fille
Il y a surtout vous
Lucide comme une sagesse
Gagnée par petits bouts
Par petites faiblesses
Par excès d'une jeunesse
Que vous avez décrite
Avec tant de justesse
Que ça rend nostalgique
Il y a surtout vous
20 ans et tant d'poussières
Que vos cheveux du coup
Sont tout de blanc couverts
Il y a surtout vous
Qui m'ouvrez votre coeur
Il y a surtout vous
Pour mon plus grand bonheur